Le mois des fiertés est toujours la période où les mêmes débats reviennent : « La Marche Des Fiertés permet-elle de soutenir la cause ou encourage t-elle l'homophobie ? », ou encore « Les personnes habillées en BDSM sont-elles trop provocantes ? », et en dernier lieu « Est-ce que la Marche des Fiertés est un lieu pour les enfants ? »
LGBTQIA-Pride : Ceci n'est pas une pipe.
« Ceci n'est pas une manifestation », « ceci n'est pas un carnaval ». En réalité la Marche est peut-être bien les deux à la fois, et c'est peut-être même, sur cette ligne de crête, qu'elle trouve son principe cardinal.
En premier lieu, et c'est une évidence, il s'agit d'une manifestation politique. On y trouve des revendications pour les personnes homosexuelles, bisexuelles, transgenres, inter-sexes, queers, asexuelles. Les différences sont finalement assez subtiles entre un défilé de la CGT et une Marche des Fiertés. Les mêmes mégaphones usés côtoient les mêmes pancartes, le long des mêmes parcours. Les nuances sont de l'ordre de l'esthétique, les paillettes et les culs sont plus nombreux, la musique est meilleure, et on trouve ici et là quelques danseurs...
C'est là que rentre dans le discours, la dimension carnavalesque, et frivole, de la Marche des fiertés. Au-delà des droits réclamés, on célèbre ceux déjà acquis de longue lutte. La Marche se rapproche alors de la Fête des Fous décrites par Victor Hugo dans « Notre Dame de Paris », les valeurs y sont ridiculisées, les genres deviennent flous, et l'ordre sociale est renversé. C'est l'héritage directe des Saturnales romaines, dont la Fête des Fous est la descendance christianisée.
Collectif et Individuel : Une Lutte Pour Tous.
La Marche « Manifestation » et la Marche « Carnaval » sont, de mon point de vue, les deux faces d'une même pièce.
| Des banderoles et des drapeaux. |
La Pride, en tant que marche politique donne une dimension collective aux divers communautés discriminées pour leurs genres ou leurs sexes. Mais son message, sa communication vise également des communautés. Au premier rang de ses communautés visées, on trouve la « Nation », puisque c'est dans cet espace que l'on exerce, en théorie, notre souveraineté, et donc la politique dans son sens traditionnel. On peut aussi voir cette manifestation comme ayant des visées à l'encontre des communautés religieuses rétrogrades ou des institutions (Exemple : la police), qui sont elles aussi, des formes de collectivités ou des émanations de celles-ci.
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| Les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence |
Si la manifestation vise certains groupes sociaux, le carnaval vise l'individu. En troublant le genre, en révélant ses fétichismes, on expose l'autre à un questionnement sur soi-même, sur son genre et sa sexualité. La réaction violente, de l'extrême-droite, face à deux hommes en string se tenant par la main est révélatrice. Ils n'ont pas de relation sexuelle, ils n'ont pas le sexe à l'air, et néanmoins certains trouvent cela choquant. C'est ce choc qu'il faut questionner et que chaque individu devrait étudier en son fort intérieur. Notre corps doit-il être source de honte ? Pourquoi devrions-nous le cacher ? Le même raisonnement est applicable aux défilés « Puppy play » et BDSM, en général. Quel est le problème à voir un homme déguisé en chien ? Sinon qu'il suggère une sexualité. Et dans ce cas, faut-il interdire la suggestion ? Et si les réponses et réactions sont si violentes, c'est peut-être que notre société normalise encore trop les sexualités, car les mêmes s'indignant de voir deux femmes enchaînées l'une à l'autre, ce scandalisent bien moins de l'exploitation commerciale de ces mêmes corps dans des publicités pour des savons.
Imposer un message à l'individu, ainsi qu'à des institutions, c'est le double objectif des Marche des Fiertés. Sur la ligne de crête, entre la provocation carnavalesque et la manifestation politique, c'est probablement la clef de son succès.
La droite est choquée : On s'en fout !
Je me souviens de la « Une » d'un journal d'extrême-droite avec des homosexuels « provocants et dénudés » comme le disait un commentaire Facebook. Nous serions donc choquants. Pourtant l'image n'était pas en Une de Têtu, de Gai Pied, ou de Garçon Magazine. Si l'image est choquante pourquoi en faire la promotion et la diffusion ? Pourquoi, si elle n'est pas appropriée, doit-elle être présente dans tous les kiosques de France ? Nous sommes au comble du paradoxe, car oui, la plupart du temps, les images « choquantes » de la Marche des Fiertés sont diffusés par les mêmes qui s'en scandalisent, alors que des sexes à l'air pour fêter la coupe du monde de football, ce n'est, pour eux, pas un problème.
Et combien faut-il être étroit d'esprit pour ne pas supporter que, une fois par an, durant une journée, les gens se libèrent des carcans de leur vie ordinaire ? Qu'ils célèbrent leurs vices, au lieu de leur vertu, pendant une unique journée ? Nous sommes le pays de Laclos, de Sade, et de Nerciat, et si la Marche vient des USA, la France s'honore d'y contribuer, car elle fut, à une époque, la patrie des libertins, et les défenseurs de la France Éternelle, ferait bien de s'en souvenir.
Extrait de Prayers For Bobby (VF : Bobby Seul Contre Tous) :
Si vous voulez comparer la représentation d'une pride par l’extrême-droite (photo ci-dessus) et par une personne concernée (vidéo ci-dessous).
Les enfants à la Pride, c'est non.
Vous êtes une famille homoparentale, ou hétérosexuelle et alliée de nos luttes, c'est bien, et surtout, merci. En revanche, ne venez pas vous plaindre que, je cite : « On ne peut pas emmener les enfants car des gens sont provocants. »
En premier lieu, un enfant ne verra qu'un homme déguisé en chien, là où vous voyez un jeu pervers. Si vous n'êtes pas convaincu, vous pouvez également vous interroger sur vous mêmes et sur le fait d'emmener un enfant dans une « célébration des sexualités et des genres alternatifs ».
En second lieu, une Marche des Fiertés est, comme je le disais, une manifestation politique avec les risques qui sont liés à ce genre d'événement. Les émeutes, les violences policières, le gaz lacrymogène, ceux sont des possibilités, voir probabilités, durant une Pride, est particulièrement durant la Marche des Fiertés de Paris.
Vos enfants n'ont rien à faire dans une manifestation, que ce soit les Marches des Fiertés ou les autres, c'est dangereux !
La Marche des Fiertés est une diversité de chose. Elle est la manifestation de nos luttes, le carnaval de nos désirs, la fête de nos libertés, la mémoire de ceux que nous avons perdus, et elle est riche de toutes ses dimensions.



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